Chapitre 1 : un leader partage sa vision
Dans cette série de récits fictifs assez autoportants, je vous propose de suivre la réalisation d’une vision stratégique, à travers plusieurs personnages d’une même direction. Chaque article constitue un chapitre dans lequel les protagonistes recherchent leur part de motivation intrinsèque, ainsi que l’équilibre entre celle-ci et la réalité des décisions économiques dans une entreprise.
Ceux qui me suivent depuis plusieurs années reconnaîtront les thématiques qui me passionnent depuis le début de mes aventures de coach agile en 2015, au travers de conférences, ateliers et articles.
Commençons par notre leader, Guillaume. Il croit à la vision stratégique qu’il vient de présenter à ses équipes.
Pourtant, il n’a pas été capable de la communiquer et de bien la partager.
Qu’aurait-il pu faire de mieux à la place ? Qu’aurait-il dû faire d’autre ?
Un leader présente sa vision à ses équipes
Guillaume est gestionnaire depuis dix ans dans une grande entreprise privée d’assurances personnelles. Compétent, motivé, proche de ses collaborateurs et collaboratrices, tout en conservant une vue d’ensemble et une bonne connaissance de la stratégie à moyen et long terme, il a évolué naturellement vers le poste de directeur général qu’il occupe aujourd’hui.
Il est respecté par celles et ceux qui le connaissent depuis longtemps et savent qu’il mérite sa place.
Récemment, il a présenté sa vision stratégique pour les trois prochaines années. Cette vision a émergé d’ateliers riches en échanges avec son équipe de direction et quelques membres du personnel qui démontrent des compétences de leadership et une envie de s’impliquer dans l’évolution de leur direction.
Guillaume croit beaucoup à cette vision qui rejoint ses valeurs : une croissance propulsée par une offre de service enrichie et modernisée, mesurée sur la satisfaction et le volume de la clientèle, dans un système dont les valeurs sont la collaboration, le développement des compétences et du potentiel humain, le leadership partagé et l’autonomie dans le travail.
Guillaume a manqué sa cible
Pourtant, le message ne semble pas être bien passé. Guillaume a même surpris une conversation entre quelques responsables d’équipe qui trouvaient que c’était une présentation inutile où rien de vraiment nouveau ni motivant n’a été amené.
On lui a rapporté aussi que certains membres du personnel y ont entendu des promesses creuses dignes d’un politicien, pour lesquelles ils n’attendent pas de gestes concrets à l’avenir. Guillaume est déçu de ce résultat et surtout de lui-même !
Qu’aurait-il pu faire de mieux à la place ? Qu’aurait-il dû faire ?
Il croyait tellement fort dans cette vision et cette présentation !
Il parle de sa déception à Claude, un de ses plus proches collaborateurs qu’il connaît depuis vingt ans.
« Tu t’es beaucoup investi dans la vision, je le sais, j’étais là ! » lui répond son ami. Mais dans la présentation, t’es-tu investi toi-même ou as-tu seulement investi… des efforts, du temps ? »
Guillaume le regarde, intrigué, mais intéressé. Claude continue :
« Dans ta présentation, je n’ai pas retrouvé le Guillaume allumé, inspiré de tes ateliers. Ça n’avait pas l’air d’être ta vision, mais celle d’une entité impersonnelle, une vision corpo qui n’appartient à personne et que personne ne porte ! »
Mettant son orgueil de côté, Guillaume s’efforce de suivre le fil de ces commentaires :
« Tu as fait ce qu’on attendait de toi, ou ce que tu pensais qu’on attendait de toi.
Tu as présenté des arguments logiques dans une belle présentation, très professionnelle.
Mais tu n’as pas partagé ce que ta vision signifie vraiment pour toi, pourquoi elle te parle, t’inspire à aller de l’avant, te projette dans un avenir qui te fait vibrer ! »
Claude peut lire dans le visage de Guillaume que son discours a touché sa cible.
Comment alors aurait-il pu inspirer les membres de ses équipes ? Que pouvaient-ils trouver pour eux dans cette vision ?
Rien, ou si peu. Il le comprend clairement maintenant.
Guillaume part en campagne
« J’aurais dû parler de ma propre voix, directement, sans présentation même, pourquoi pas ? », se dit-il.
« De mes expériences et de mes envies qui m’ont amené à cette vision. Et initier un échange avec mes collaborateurs et collaboratrices. Ça aurait dû être comme ça, le partage de ma vision.
C’est encore possible, mais pour rattraper une mauvaise rencontre, il faut mettre les bouchées doubles ! »
Guillaume va partir en campagne pour sa vision.
Il organise une série d’ateliers d’échanges avec les membres, sur une base volontaire.
Lors d’une de ces rencontres, il parle de cet ancien collègue, plus expérimenté que lui, qu’il a toujours considéré comme un mentor et qui lui a montré les ficelles du métier, mais surtout qui a cru au leader que Guillaume allait devenir.
De ce qu’il lui a apporté et comment, aujourd’hui, cela lui donne l’envie de donner aux prochains en mettant en place un programme de développement des compétences incluant une offre de mentorat interne.
Il évoque aussi les expériences moins bonnes qui lui ont beaucoup appris.
Comme cette équipe où certains gardaient les informations; pour eux afin d’avoir un avantage sur les autres tant la compétitivité était grande, stimulées par des incitatifs liés à la performance.
Jusqu’à ce que la gestion s’aperçoive que, sans entraide pour résoudre les problèmes, les résultats globaux n’étaient pas au rendez-vous !
Dans d’autres rencontres, il ne parle pas ouvertement de ses expériences mais il les a en tête et cela donne à ses propos une conviction et une sincérité qu’il peut observer dans les réactions des gens en face de lui.
Au fur et à mesure de ces ateliers, de nouveaux soutiens à sa vision émergent, cherchent à s’impliquer et font même des propositions qui viennent nourrir la réflexion ou offrir de nouvelles pistes.
La vision décolle
Les idées qui émergent de ces ateliers sont rassemblées dans un carnet visible par tout le monde.
Estelle, enthousiaste, se propose pour lancer une expérience de mentorat dans son service. Elle va d’abord convaincre sa supérieure directe de soutenir cette initiative en lui donnant des moyens et en défendant la proposition.
Emmanuel, de son côté, apporte l’idée de recueillir les besoins et commentaires à travers un comité de clients et d’utilisateurs qu’il commence à mettre en place, grâce à ses relations et son sens du contact client.
Encouragé par ces réactions positives, Guillaume va rechercher la rétroaction et le soutien de ses pairs dans les autres directions générales. Vont-ils être aussi enthousiastes ?
De leur côté, Olivia et Pierre se réunissent pour réfléchir aux priorités et ébauchent une feuille de route des améliorations à mettre en place.
Guillaume participe peu aux discussions, mais se rend disponible en réservant un créneau hebdomadaire dans son horaire pour rencontrer ces nouveaux agents de changement, en répondant aux questions et en échangeant avec eux sur les bénéfices éventuels qu’on peut espérer.
De manière générale, il préfère les regarder avancer d’un œil bienveillant, ravi que sa vision vole de ses propres ailes, portée maintenant par un plus grand nombre…
Et toi, qu’aurais-tu fait à la place de Guillaume ? Que lui aurais-tu conseillé ?
Partage tes idées ou tes expériences semblables en commentaires !
Le prochain article racontera les expériences d’Estelle et d’Emmanuel et de leur motivation intrinsèque à contribuer à la vision de Guillaume. Suivez-nous pour ne pas le manquer !