Lorsque je présente les valeurs Agile, j’utilise toujours la même approche. Je m’adresse généralement à des habitués de la pensée traditionnelle, je module donc mon discours en conséquence.

En clair, cela veut dire qu’après avoir présenté ceci:

J’ai toujours la mention suivante:

Entre vous et moi, c’est pour ménager l’audience que je me sens obligé d’ajouter cette mention.

Juste assez

On adresse donc la notion du « juste assez » en exposant que les éléments de droite doivent soutenir la colonne de gauche, sans plus. Voici comment ça se passe dans un cerveau traditionnel:

• On doit continuer de renforcer les processus et on continue d’avoir des outils centralisés;
• On doit alléger nos pratiques documentaires. Les programmeurs commentent déjà peu leur code, on est donc conforme sur ce point;
• Je collabore déjà avec mes clients. Le contrat me sert lorsque le client exagère sur la portée;
• Comme le dit la mention, on doit faire un plan. Ensuite, à chaque changement, on change le plan. C’est déjà ce qui se passe: j’ajuste mon Gantt toutes les semaines, suite aux suivis que je reçois.

JE SUIS DÉJÀ FULL AGILE!!!

Soyons honnêtes

C’est lorsqu’on ajoute la notion du « juste à temps » au « juste assez » que ça se corse.

Processus et outils

Si un outil ou un processus nuit à la collaboration entre les individus, on doit le retirer ou le modifier. (Juste assez)

Les outils nécessaires à la collaboration doivent être disponibles dès qu’on en a besoin. Il est plus important d’avoir un outil rapidement que d’avoir le meilleur outil avec toutes les fonctionnalités disponibles. (Juste à temps)

Documentation exhaustive

Seule la documentation nécessaire (juste assez) pour soutenir l’incrément de produit actuel (juste à temps) doit être produite.

La stratégie documentaire doit donc être incrémentale et intégrée au processus de travail.

Certains cas pourraient justifier que la documentation soit produite en parallèle ou après le produit fonctionnel, ou même jamais.

Négociation contractuelle

Un contrat simplifié reconnaissant les modalités de paiement, certains enjeux légaux et la nature de la prestation peut être produit. (Juste assez)

Les éléments de portée sont négociés au fur et à mesure de l’avancement en favorisant l’engagement au dernier moment responsable. (Juste à temps)

Suivi d’un plan

Un plan haut niveau peut être produit si nécessaire. (Juste assez)

Comme pour la documentation, le plan doit exposer l’incrément de produit à faire. (Juste à temps)

Si l’alignement, la vision, la stratégie et les objectifs sont assez clairs, le plan est peut-être même superflu. Une bonne mécanique de priorisation et un bon suivi d’avancement (ou des métriques) peuvent suffire.

L’engagement tardif, le « juste à temps », est très difficile à comprendre et à enseigner

Nous sommes habités par le désir de voir venir les choses, de schématiser l’avenir de façon linéaire et ordonnée, alors que la réalité est chaotique et complexe. Il est donc très difficile d’accepter qu’il est inefficace d’agir de façon préventive sur les éléments qui ont une probabilité de se concrétiser.

Il est aussi très difficile de ne pas agir sur des éléments connus d’avance dans notre monde où les « gens d’action » sont toujours mis en valeur. Il en va de même pour les décisions. Elles peuvent presque toujours être remises à plus tard.

Le plus gros frein à l’Agilité réside dans la capacité (ou l’incapacité) individuelle à continuellement se questionner sur le « Juste assez, Juste à temps ».

La paresse et la procrastination sont des vertus dans notre monde complexe et volatile.

La vraie efficience réside dans l’habileté à maximiser la quantité de travail à ne pas faire ou à repousser au moment opportun. Nous arrivons ainsi à conserver le focus sur ce qui doit être fait maintenant.